Co-culture, au-delà des frontières culturelles des espèces animales
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Une étude parue dans la revue Trends in Ecology and Evolution dévoile le concept de co-culture pour explorer les dynamiques culturelles entre différentes espèces animales. Cette étude met en lumière comment les interactions interspécifiques façonnent les évolutions comportementales et cognitives réciproques, dépassant les frontières de la culture spécifique à une espèce.
Cet article introduit le concept de "co-culture". Cette idée explore comment les différentes espèces animales, y compris les humains, interagissent et influencent mutuellement leurs développements culturels. Habituellement, nous pensons à la culture comme quelque chose de propre à une espèce – les traditions humaines ou les chants spécifiques des baleines, par exemple. Cependant, cette recherche montre que la culture peut transcender les barrières entre les espèces.
La culture chez les animaux se définit comme la transmission de comportements et de connaissances d'une génération à l'autre par l'apprentissage social et l'imitation, plutôt que par la génétique. Un comportement culturel doit être présent au moins dans une population d’un espèce, absente dans une autre et cette différence ne s’explique pas par des facteurs écologiques. La co-culture, elle, est définie dans l’étude comme l'échange et l'adaptation réciproque de comportements et de connaissances entre espèces qui partagent un environnement. Ces interactions peuvent conduire à des changements significatifs dans la manière dont les espèces apprennent, se comportent et évoluent. Par exemple, des oiseaux peuvent apprendre à ouvrir des emballages de nourriture en observant les humains, et inversement, les humains peuvent adopter des stratégies médicinales ou d’utilisation d’outils observées chez d'autres animaux.
Un aspect particulièrement intéressant de la co-culture est son impact sur les adaptations comportementales et cognitives. Dans les environnements urbains, par exemple, on observe que de nombreux animaux adoptent des comportements innovants pour cohabiter avec les humains. Les corbeaux utilisent les passages piétons pour casser des noix, tandis que certains mammifères ajustent leurs horaires d'activité pour éviter les heures de pointe humaines.
La co-culture ne se limite pas aux ajustements pratiques ; elle englobe également des échanges plus profonds, comme ceux observés dans les interactions entre différentes espèces de chauves-souris ou entre les macaques japonais et les cerfs sika. Ces interactions vont au-delà du simple partage d'espace ou de ressources : elles incluent des adaptations mutuelles qui peuvent influencer les stratégies de reproduction et de survie.
L'étude souligne également l'importance de la co-culture pour la conservation et la planification urbaine. En comprenant comment les animaux s'adaptent culturellement aux environnements partagés, nous pouvons mieux concevoir des interventions de conservation qui respectent et intègrent ces interactions complexes. Cela pourrait mener à des stratégies plus efficaces pour maintenir la biodiversité en milieu urbain comme rural.
En conclusion, l'approche de la co-culture propose une perspective enrichissante et largement applicable pour étudier les interactions locales entre les espèces. Elle nous invite à repenser nos propres pratiques et notre impact sur d'autres espèces avec lesquelles nous partageons notre monde. Ces travaux ouvrent des voies précieuses pour des recherches futures et offrent des perspectives originales pour les efforts de conservation, tout en soulignant combien nos vies sont interconnectées avec celles de nos voisins non humains.
Référence de la publication
Sueur, C., & Huffman, M. A. Co-cultures : exploring interspecies culture among humans and other animals. Trends In Ecology & Evolution, publié le 19 juin 2024.
Laboratoire CNRS impliqué
Institut Pluridisciplinaire Hubert Curien (IPHC - CNRS/Univ. Strasbourg)