La diversité morphologique chez l’Homme s’établit avant la puberté
Les différentes populations d’Hommes se distinguent par leur morphologie spécifique. Cette diversité, constatée chez les adultes, est-elle acquise au cours de la croissance ? Dans un article publié dans Scientific Reports, deux chercheurs du CNRS, issus des laboratoires Eco-anthropologie (EAE – MNHN / CNRS) et De la diversité des populations à l'individu, de l'identification à l'identité (BABEL – CNRS / Univ. de Paris) ont analysé la croissance de trois populations de morphologies très différentes. Ils démontrent que la cinétique de croissance de ces populations est comparable à partir de la période pubertaire. Ainsi, la diversité humaine, conséquence de l’adaptation aux divers environnements, résulte de processus qui ont lieu pendant les premières périodes du développement.
Notre espèce, Homo sapiens, est l’espèce de primate qui présente la plus large variation morphologique et que l’on retrouve dans des environnements différents. La culture a facilité la dispersion géographique de l’homme mais il est évident que les différents processus biologiques (croissance et développement) qui façonnent la morphologie ont joué un rôle fondamental pour l’adaptation des populations aux différents milieux.
Malgré les différences morphologiques entre les populations, l’humain, à la différence des autres espèces, présente une longue période de croissance (le double que chez notre plus proche parent, le chimpanzé) et des poussées de croissance à l’adolescence. En d’autres termes, certains aspects de croissance et de développement sont semblables entre les populations malgré leur diversité morphologique qui révèle aussi l’existence de processus différents. La distinction entre les aspects qui sont constants au sein de notre espèce et ceux qui varient entre les populations est fondamentale à deux titres. D’une part, cette distinction sert à mieux comprendre ce qui caractérise notre espèce par rapport aux autres espèces de primates et, d’autre part, elle permet de définir les différences liées à l’adaptation des populations aux contraintes de leur environnement.
Dans une nouvelle étude publiée dans Scientific Reports et menée par deux chercheurs du CNRS, issus des laboratoires Eco-anthropologie (EAE – MNHN / CNRS) et De la diversité des populations à l'individu, de l'identification à l'identité (BABEL – CNRS / Univ. de Paris), le modèle de croissance d’une population française a été extrapolé à deux groupes représentant les extrémités de la variation morphologique de notre espèce : un groupe de joueurs de basketball et les Pygmées Baka dont la croissance des individus a été suivie depuis l’enfance jusqu’à l’étape adulte. Le modèle est établi à partir de la stature, la maturité biologique et l’âge au pic de croissance. Trois courbes de croissance ont été élaborées pour chaque sexe en fonction d’une puberté avancée, standard ou retardée.
L’extrapolation du modèle à ces deux groupes a permis de prédire la stature adulte avec le même haut degré de précision que dans la population de référence (±3 cm). Par conséquent, 1) les courbes de croissance s’appliquent à toutes les populations et 2) la croissance selon les stades pubertaires suit les mêmes canaux de croissance dans les populations et cela indépendamment des différences de taille chez les adultes.
Une telle découverte a un double impact très important. Tout d’abord, elle signale que les études portant sur la diversité biologique de l’homme doivent se focaliser sur les premières étapes du développement. Ensuite, d’un point de vue évolutif, elle met en lumière que les adaptations de différentes populations pour habiter des milieux divers se mettent en place avant la période pubertaire.
Référence
The same growth pattern from puberty suggests that modern human diversity results from changes during pre-pubertal development. Pineau J-C, Ramirez Rozzi FV. Scientific Reports, 2021