Renforcer le sentiment d’appartenance à la nature, une stratégie gagnant-gagnant pour l’humain et la nature

Résultats scientifiques

Malgré les accords internationaux en faveur de la préservation de la biodiversité  (ex : objectifs d'Aichi, Convention sur la diversité biologique), l’efficacité des actions menées par les décideurs reste limitée. Mais qu’en est-il des citoyens ? Existe-t-il des leviers qui permettraient une meilleure mobilisation ? A travers une méta-analyse publiée dans Conservation Letters, des chercheurs ont montré que le sentiment d’appartenance à la nature (= connexion humain-nature, CHN) améliore la préservation de la nature par les citoyens, ainsi que leur bien-être. Cette connexion se fait notamment en passant du temps dans la nature et en se concentrant sur l’instant ou l’environnement présents. Renforcer la CHN constitue ainsi un levier pour atteindre un futur durable qui pourrait être intégré dans les politiques de conservation.

schema_CHN
Les personnes avec une forte connexion à la nature sont plus heureuses et en meilleure santé, et sont également plus enclines à protéger la biodiversité et à lutter contre le changement climatique. La pratique de la pleine conscience et le contact avec la nature améliore la connexion humain-nature. L’épaisseur des flèches indique la force de l’effet.

Alors que les objectifs internationaux en matière de protection de la nature n’ont pas été atteints, les scientifiques s’interrogent sur les meilleurs leviers pour mener à une mobilisation à la fois durable et efficace. A travers une récente méta-analyse publiée dans Conservation Letters, des chercheurs de la Station d’Ecologie Théorique et expérimentale de Moulis (SETE - CNRS) ont montré que la connexion humain-nature (CHN) - définie comme le sentiment d’appartenance au monde naturel - constitue un levier permettant de renforcer le bien-être et l'engagement des citoyens pour la préservation de la biodiversité. Dans le cadre de ces travaux, 2 méta-analyses ont été réalisées :

  • Celle de 148 études corrélationnelles révèle que les personnes avec une forte CHN sont plus heureuses et en meilleure santé, et sont également plus enclines à protéger la biodiversité et à lutter contre le changement climatique.
  • Celle de 57 études expérimentales montre que la CHN augmente après la participation à des interventions comportementales impliquant une exposition à la nature (ex : promenade en forêt) ou la pratique de la pleine conscience (focaliser son attention sur le moment/environnement présent). A l’inverse, aucun effet n'est observé après des interventions visant à améliorer les connaissances sur l'environnement ou sur la biodiversité (cours magistraux, interventions dans les classes).

Cette analyse (qui porte sur des études majoritairement menées dans les pays industrialisés) montre ainsi que la CHN a un double effet positif : celui de favoriser à la fois la conservation de la nature et le bien-être humain. Deux impacts qui pourraient être amplifiés via des interventions simples, impliquant un contact avec la nature et des pratiques de pleine conscience. Ainsi, l’amélioration de la CHN via ces deux actions permettrait d'aider les individus à comprendre et à expérimenter à quel point le bien-être humain et la conservation de la nature sont interconnectés. Les scientifiques ayant mené ces travaux proposent quelques pistes pour atteindre ces effets à un coût modéré :

  • faire la promotion d’interventions ciblées et à long terme (ex : séances hebdomadaires de pleine conscience, éducation en plein air) auprès des institutions gouvernementales et non gouvernementales (UNESCO, OCDE, organisations scolaires, groupes d'éducation à l'environnement)
  • former à ces pratiques les personnes qui éduquent et instruisent les enfants (enseignants, éducateurs et parents)

À titre d'exemple, en plus des effets positifs connus sur la biodiversité urbaine et l'adaptation au climat, la "végétalisation" des cours d'école pourrait améliorer les CHN et le bien-être des personnes, et ainsi favoriser le soutien aux politiques durables.

Cette étude souligne enfin que la CHN a été surtout étudiée chez l'adulte et dans les pays industrialisés et qu’il est nécessaire de mener de nouvelles études chez l’enfant et dans les cultures traditionnelles préindustrielles. Une meilleure connaissance et appréciation des normes et valeurs culturelles et de leur développement dans diverses sociétés, tant traditionnelles qu'industrielles, devrait contribuer à l'amélioration des politiques internationales en matière d'environnement et d'éducation, et donner aux citoyens et aux gouvernements les moyens d'atteindre des objectifs durables à l'échelle mondiale.

Laboratoire CNRS impliqué

Station d'Ecologie Théorique et Expérimentale (SETE - CNRS)

Objectifs de Développement durable

pictODD

  • Objectif 3 - Bonne santé et bien-être
  • Objectif 4 - Education de qualité
  • Objectif 11 - Villes et communautés durables
  • Objectif 12 - Consommation et production durables
  • Objectif 13 - Mesures relatives à la lutte contre le changement climatique
  • Objectif 15 - Vie terrestre

Référence

Barragan-Jason, G., de Mazancourt, C., Parmesan, C., Singer, M., & Loreau, M. (2021). Human-nature connectedness as a pathway to sustainability: a global meta-analysis. Conservation Letters. DOI : 10.1111/conl.12852

Contact

Gladys Barragan-Jason
Station d'Ecologie Théorique et Expérimentale (SETE - CNRS)
Catherine Clerc
Correspondante communication - Station d'Ecologie Théorique et Expérimentale (SETE - CNRS)