Menace du changement climatique sur la grande Barrière de corail : comment mobiliser le public ?
Certains paysages emblématiques comme la Grande Barrière de corail appartiennent au patrimoine mondial. La menace du changement climatique qui pèse sur une de ces zones naturelles pourrait être un levier pour mobiliser le public sur des actions de protection. Des chercheurs australiens du Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation (CSIRO), de la James Cook University (JCU) et français du CRIOBE (CNRS/Université de Perpignan Via Domatia/EPHE) ont analysé les réactions de milliers de touristes australiens et internationaux suite aux évènements de blanchissement massifs de la Grande Barrière de corail en 2016 et 2017. Leur étude a montré que cette crise du blanchissement du corail a modifié la perception des touristes, qui ont alors considéré le changement climatique comme une menace immédiate. Ces travaux ont été publié dans Nature Climate Change.
Des milliers d'Australiens et de visiteurs internationaux ont répondu à une enquête menée par des chercheurs du Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation (CSIRO), de la James Cook University (JCU) et du CRIOBE (CNRS /Université de Perpignan Via Domatia/EPHE) avant et après les épisodes de blanchissement de 2016 et 2017.
Cette enquête a permis de mettre en évidence chez les participants des signes de « deuil écologique » en réaction aux dommages subis par cet écosystème iconique. Les émotions négatives, comme la tristesse, le dégoût, la colère ou encore la peur, associées aux mots exprimés dans de courtes déclarations à la question « que représente pour vous la Grande Barrière ? » ont en effet augmenté suite aux épisodes de blanchissement. Pourtant cette étude a montré que ces sentiments négatifs diminuaient chez les participants le sentiment d’un impact possible des actions individuelles .
En parallèle, les chercheurs ont constaté que les participants attribuaient une plus grande valeur au Récif, notamment à sa biodiversité, son patrimoine scientifique et son statut de symbole international. Les participants étaient ainsi plus disposés à soutenir les actions collectives visant à protéger le récif. Cette empathie pourrait être le signe que le public soutiendrait des actions collectives visant à atténuer les menaces qui pèsent sur le Récif.
Les auteurs de cette étude ont observé une augmentation significative de la proportion de personnes pensant que le changement climatique constitue « une menace immédiate nécessitant des actions ». En 2013, environ 50% des visiteurs australiens reconnaissaient le changement climatique comme une menace immédiate. En 2017, ce chiffre a atteint 67%. Parmi les visiteurs internationaux, cette proportion était encore plus élevée (64% en 2013 et 78% en 2017). Cela représente un changement remarquable d'attitude du public à l'égard du changement climatique sur une période relativement courte.
Enfin, en comparant leurs résultats avec ceux d'autres études sur la couverture médiatique et le style de reportage associés aux blanchissements corallien de 2016-2017, les auteurs ont pu démontrer que ces événements, ainsi que les représentations médiatiques qui y ont été associées, ont considérablement contribué au changement d'attitude du public à l'égard du changement climatique.
Ainsi, « une approche plus ciblée de la communication et de l'engagement du public est nécessaire afin d’encourager les actions collectives qui contribueront à atténuer les changements climatiques et à réduire les autres menaces qui pèsent sur le Récif » concluent les chercheurs.
Référence
Curnock MI, NA Marshall, L Thiault, SF Heron, J Hoey, G Williams, B Taylor, PL Pert, J Goldberg (2019). Shifts in tourists’ sentiments and climate risk perceptions following mass coral bleaching on the Great Barrier Reef. Nature Climate Change