Paranthropus capensis, une espèce redécouverte

Résultats scientifiques

Découvert en 1949 en Afrique du Sud, la mandibule SK 15 a d’abord été attribuée à Telanthropus capensis, et est désormais considérée depuis les années 1960 comme représentant Homo erectus. Une nouvelle étude de ce fossile menée par Clément Zanolli, chercheur CNRS au Laboratoire PACEA, vient d’être publiée dans le Journal of Human Evolution et révèle que SK 15 appartenait à une espèce de Paranthrope plus gracile que celles actuellement reconnues.

En résumé

  • Le genre Paranthropus est généralement caractérisé par une petite taille (1,1 à 1,4 m), une morphologie crânio-faciale robuste et de grosses dents.
     
  • Trois espèces de Paranthropes ayant vécu entre 2,6 et 1,2 millions d’années sont reconnues en Afrique : P. aethiopicus, P. boisei et P. robustus.
     
  • Une nouvelle étude révèle qu’une espèce sud-africaine moins robuste, P. capensis, a coexisté avec P. robustus et les premiers humains. 

La sous-tribu des Hominina (ou hominines) regroupe nos proches parents les Paranthropes et Australopithèques, ainsi que nous-mêmes, les humains actuels et les espèces éteintes de notre genre Homo. 

L’étendue de la diversité des hominines est constamment réévaluée au fil des nouvelles découvertes et grâce au progrès des méthodes d’analyses par imagerie virtuelle qui permettent d’accéder à des informations paléobiologiques enfouies à l’intérieur des fossiles. La révision de spécimens clés comme SK 15, considéré depuis des années comme un représentant d’H. erectus en Afrique du Sud en est l’exemple même. 

Une étude de la structure interne des dents de SK 15 publiée dans la revue PNAS en 2022 par Clément Zanolli et ses collaborateurs avait déjà suggérée que ce spécimen n’appartienne pas au genre Homo mais à Paranthropus (https://www.inee.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/les-premiers-humains-en-afrique-australe). La nouvelle étude, toujours menée par Clément Zanolli et ses collègues, a entrepris d’effectuer la reconstruction virtuelle de la mandibule (Fig. 1), ainsi que la révision globale du spécimen, prenant en compte différents aspects de la morphologie de l’os mandibulaire et des dents (Zanolli et al., 2024). Toutes ces analyses ont permis de confirmer que la mandibule SK 15 n’appartient pas au genre Homo, mais aussi de démontrer qu’une espèce de Paranthrope moins robuste que celle reconnue à la même époque en Afrique du Sud a existé. 

figure1
La mandibule SK 15 originale (à gauche) et la reconstruction virtuelle du spécimen (à droite). Les parties de la mandibule qui ont été fracturées et déplacées au cours de la fossilisation ont été repositionnées pour rendre à l’holotype de Paranthropus capensis sa morphologie initiale. © C. Zanolli

SK 15 est l’holotype (le spécimen de référence) de Telanthropus capensis. Même si le genre Telanthropus n’est plus reconnu aujourd’hui, le nom d’espèce capensis reste valide, et l’espèce Paranthropus capensis peut donc être établie. Cette espèce présente certaines des caractéristiques de Paranthropus comme un corps mandibulaire proportionnellement robuste et une arcade mandibulaire modérément arrondie et allongée. Cependant, P. capensis diffère de P. robustus par de plus petites dents, mais aussi par une morphologie plus simple de la couronne des molaires (Fig. 2). La présence de deux espèces de Paranthropes vers 1,4–1,2 millions d’années en Afrique australe et montrant des dimensions et morphologies des mâchoires relativement différentes suggèrent que ces dernières devaient avoir des niches écologiques différentes. Le paysage sud-africain de l’époque incluait donc une grande diversité d’hominines, dont H. erectus, P. robustus et P. capensis. Les relations et interactions écologiques entre ces espèces restent encore à clarifier, et leur éventuel lien de parenté avec les espèces hominines ayant existé ensuite au Pléistocène moyen, comme H. naledi et d’autres espèces du genre Homo doit encore être investigués.

 

figure2
Les molaires du spécimen SK 15, appartenant à l’espèce P. capensis (en haut), montre des dimensions plus petites, des couronnes morphologiquement plus simples et des racines proportionnellement plus courtes et différentes de celles de P. robustus (en bas).

Laboratoire CNRS impliqué

  • Laboratoire De la Préhistoire à l’Actuel : Culture, Environnement et Anthropologie (PACEA - CNRS / université de Bordeaux / Ministère de la Culture)

Zanolli, C., Hublin, J., Kullmer, O., Schrenk, F., Kgasi, L., Tawane, M., & Xing, S. (2025). Taxonomic revision of the SK 15 mandible based on bone and tooth structural organization. Journal Of Human Evolution. Publié en janvier 2025. 

Contact

Clément Zanolli
UMR5199 De la Préhistoire à l'Actuel : Culture, Environnement et Anthropologie (PACEA - CNRS/Univ Bordeaux/MC/EPHE/INRAP
Anne-Cécile Jouvin
Communication - Fédération des sciences archéologiques de Bordeaux (FSAB - CNRS/Ministère de la culture/Univ. de Bordeaux/Univ. Bordeaux Montaigne))