Des plantes facilitatrices participent au maintien de la biodiversité en cas de sécheresse sévère

Résultats scientifiques Ecologie fonctionnelle
  • Les espèces facilitatrices améliorent les conditions environnementales locales, en particulier en conditions stressantes comme dans les zones arides.
  • Les plantes facilitatrices augmentent la survie et la croissance des autres plantes à proximité, mais uniquement dans des communautés de plantes diverses en espèces.
  • Elles pourraient ainsi jouer un rôle crucial dans le maintien de la biodiversité des zones arides, qui devraient être confrontées à des sécheresses plus sévères et plus fréquentes dans les décennies à venir.

 

Une étude récente publiée dans Oikos révèle que dans les zones arides les communautés végétales riches en espèces prospèrent sous la protection de plantes facilitatrices, qui favorisent la croissance et la survie des autres plantes. Ces résultats soulignent l’importance des plantes facilitatrices pour la conservation de la biodiversité, d’autant plus dans le contexte actuel de changement climatique.

Les zones arides couvrent plus de 40 % des terres émergées et hébergent un tiers des habitants de la planète. Ces écosystèmes sont soumis à des pressions croissantes, telles que le surpâturage ainsi que des sécheresses de plus en plus sévères et fréquentes. Or en parallèle, un nombre croissant d'études montrent que les interactions positives entre les espèces sont omniprésentes à travers le vivant, notamment entre les bactéries, les plantes et les animaux, et qu'elles jouent un rôle majeur dans le fonctionnement des écosystèmes.

C’est le cas dans les zones arides, où il existe des plantes facilitatrices (dites nurses en anglais) qui peuvent améliorer les conditions environnementales locales dans les zones arides. On trouve généralement à proximité de ces plantes un plus grand nombre d'espèces et un meilleur fonctionnement de l'écosystème. Cependant, nous savons peu de choses sur les mécanismes en jeu.

visuel zone aride
Figure 1 : Site expérimental de Santomera où l’étude a été réalisée, dans le Sud-Est de l’Espagne. On voit un grand nombre d’Armoise blanche (Artemisia herba-alba), l’espèce facilitatrice utilisée dans l’étude. © Alexandre Génin, 2016, licence CC BY 4.0.

Cette nouvelle étude, publiée dans Oikos, a révélé que les plantes facilitatrices sont davantage bénéfiques aux zones arides lorsqu'elles font partie de communautés d'espèces diverses. Elle montre que les communautés végétales ont un taux de survie plus élevé et produisent plus de biomasse pendant les sécheresses lorsqu'elles sont situées sous une plante facilitatrice et lorsqu'elles sont plus riches en espèces. À l'inverse, les bénéfices des plantes facilitatrices sont absents lorsque les communautés végétales bénéficiaires sont en monoculture (donc pauvres en espèces) ou lorsqu'elles sont arrosées (un traitement censé imiter l'effet d'amélioration des plantes facilitatrices).

L'étude montre que les plantes facilitatrices favorisent le maintien de la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes par trois mécanismes. Elles renforcent d’abord la complémentarité entre espèces dans les communautés diverses en espèces, augmentant ainsi la production de biomasse. Elles modifient également la hiérarchie compétitive entre les espèces, en favorisant davantage les espèces les moins compétitives. Enfin, l'étude suggère que les plantes situées sous le couvert des plantes facilitatrices développent des stratégies de vie associées à la réduction du stress hydrique.

Cependant, bien que les plantes facilitatrices puissent réduire ces pressions dans leur voisinage, et ainsi maintenir la biodiversité et le fonctionnement de ces écosystèmes, ces interactions positives accroissent la dépendance de ces derniers à l'égard des plantes facilitatrices. Le risque associé à cette dépendance est une désertification soudaine et irréversible des écosystèmes lorsque les plantes facilitatrices ne suffisent plus à maintenir les écosystèmes soumis à des pressions extrêmes.

Référence de la publication

Danet, A., Bautista, S., Génin, A., Beckerman, A. P., Anthelme, F., & Kéfi, S. Species diversity promotes facilitation under stressful conditions. Oikos, publié le 23 avril 2024.

Laboratoires CNRS impliqués

  • Institut des Sciences de l'Évolution de Montpellier (ISEM - CNRS / IRD / Univ. Montpellier)      
  • Botanique et modélisation de l'architecture des plantes et des végétations (AMAP - CIRAD / CNRS / INRAE / IRD / Univ. Montpellier)

Contact

Sonia Kéfi
Institut des Sciences de l'Evolution de Montpellier (ISEM – CNRS/Université de Montpellier/IRD/EPHE)
Fadéla Tamoune
Communication - Institut des Sciences de l’Évolution de Montpellier (ISEM - CNRS/Univ. Montpellier/IRD)