Des objectifs de développement durable clairs mais des lacunes de connaissances sur les chemins pour les atteindre
Une synthèse des rapports de l’IPBES, le GIEC de la biodiversité, réalisée par une équipe internationale de plus de 30 scientifiques dont Sandra Lavorel (Laboratoire d’Ecologie Alpine) et Bruno Locatelli (CIRAD), publiée dans la revue Nature Sustainability identifie les besoins de connaissances sur la gouvernance, les institutions et les liens entre les systèmes sociaux et écologiques pour atteindre les objectifs de développement durable en surmontant la perte de biodiversité actuelle.
Les politiques internationales définissent des objectifs clairs pour la protection des écosystèmes et de la biodiversité, mais les moyens pour les atteindre restent difficile à mettre en œuvre, comme le montre la perte de biodiversité qui se poursuit à un rythme alarmant. Une nouvelle étude identifie les principales lacunes de connaissances auxquelles il faudrait remédier pour s'attaquer aux causes profondes de l’érosion de la biodiversité et appelle à une recherche plus pertinente, centrée sur les solutions pour faire face à la crise socio-écologique.
L’étude identifie les lacunes de connaissances révélées par sept évaluations récentes réalisées par l’IPBES ou Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques. Les évaluations de l’IPBES synthétisent les connaissances sur les relations entre l’homme et la nature, y compris le rôle de l’homme dans la gestion des écosystèmes pour fournir des bénéfices à la société. Les rapports IPBES sont un outil essentiel pour influencer à la fois l’élaboration de politiques fondées sur des preuves et l’établissement de programmes de recherche scientifique.
Les auteurs ont comparé les lacunes identifiées dans les rapports de l'IPBES avec les objectifs internationaux de durabilité définis par les Nations Unies, plus précisément les objectifs d'Aichi relatifs à la biodiversité, adoptés en 2010 dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique, et les objectifs de développement durable, adoptés en 2015. L’étude conclut que les objectifs mondiaux en matière de développement durable ne pourront être atteints sans une meilleure connaissance des interactions entre les systèmes sociaux et écologiques. Nous devons mieux comprendre comment les systèmes de gouvernance et les institutions peuvent assurer la provision de services écosystémiques équitablement et protéger les personnes vulnérables.
L'analyse a révélé que des progrès avaient été accomplis pour combler certaines des lacunes de connaissances identifiées dans l'Évaluation des écosystèmes pour le millénaire, de 2005, notamment une meilleure compréhension des tendances à long terme des changements écologiques. Néanmoins, après des décennies de recherche, certaines lacunes de connaissances persistent et des nouvelles ont émergé. Cependant, les nécessités de connaissances les plus pressantes sur les interactions entre systèmes sociaux et écosystèmes restent les mêmes depuis 2005. De plus, les évaluations de l’IPBES ont montré des lacunes importantes sur le rôle des connaissances autochtones et locales dans la préservation de la nature et de ses contributions aux populations. Les auteurs estiment qu’il faut maintenant faire entrer dans la discussion ceux qui ont une expertise approfondie des mécanismes de changement social et de gouvernance, y compris les acteurs et les décideurs locaux.
Enfin, les auteurs soutiennent que les lacunes dans les connaissances qu'ils ont identifiées devraient contribuer à la définition de nouveaux objectifs mondiaux en matière de biodiversité, qui devraient être adoptés en 2020 dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique.
Référence
Matias Mastrangelo et al., Key knowledge gaps to achieve global sustainability goals, Nature sustainability, Oct. 2019